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Message ou FAQ

 

Faire une thérapie n'est pas inutile


Février 2013

Note de Chantal POIGNANT.
Johanna et moi avons communiqué pendant de nombreux mois.
Aujourd'hui, elle va mieux ; je lui ai demandé de bien vouloir témoigner.
Merci.

alors voilà un résumé d’une sombre histoire dont je suis enfin sortie…
je me suis toujours, depuis petite, sentie différente, et surtout à l’adolescence, mal
dans ma peau ; à un point que je cherchais une explication à ce malaise, et j’aurais notamment eu envie que mes parents me disent par exemple que j’avais été adoptée… ça aurait expliqué des choses pour moi… mais il n’en a rien été, et la vie a continué… toujours un peu mal dans mes baskets, mais sans raison apparente… jusqu’à il y a 7 ans environ, j’avais 35 ans… j’ai commencé à faire des cauchemars, à rentrer dans des pensées obsédantes que je n’expliquais pas… alors a s’est amorcée une longue thérapie qui a duré 6 ans… et qui m’a beaucoup remuée ; ça a été très douloureux ; je voyais en boucle des images qui me hantaient, ça a commencé par un drap noir qui me tombait lentement dessus alors que j’étais allongée dans mon lit, puis au fur et à mesure des séances, des années, des images de plus en plus terrifiantes, des scènes d’attouchements avec un homme bien plus âgé que moi. S’en est suivie une longue descente aux enfers, dans ce long processus qu’est la dépression. Dépression profonde, des médicaments à dose de cheval, où je ne me rendais plus compte de rien ni de personne, pas même de mes propres enfants ni de mon homme… Presque un an d’hospitalisation, des traitements très lourds… mais aujourd’hui, un an et demi après la fin des hospitalisations, je suis capable de réécrire et j’ai enfin retrouvé mes esprits…   bref, cet homme, je ne sais toujours pas qui il est. Si j’en crois les personnes compétentes qui m’ont entourée dans ces moments atroces, en gros les médecins, psychologue, psychiatre, et mon chéri, il n’y a pas de doute possible, cet homme est un parent proche… mon père ?? j’ai longtemps lutté contre cette possibilité… mes parents sont des gens formidables, et je les adore… ils sont incapables d’avoir contribué à ça… ils ont toujours été là dans les moments difficiles, ils se plieraient en 4 pour leurs enfants et petits-enfants… ce n’est donc tout simplement pas possible… ça a été très difficile de penser ça, de les accuser de ça… ça a été terrible de ne pas savoir si vraiment, c’était eux ou pas… et maintenant, je sais… je sais en fait que je ne saurai probablement jamais…  Alors comment réagir face à eux ??? j’ai fait un choix : celui de me dire que ma famille, maintenant, c’était d’abord mon chéri et mes enfants… pour les autres, je ne sais pas… je leur accorde le «  bénéfice du doute » ; c’est-à-dire que je n’ai pas rompu le lien (comme je ne suis pas sûre que ce soient bien eux les coupables, je ne pourrais pas vivre en imaginant le mal que je leur ferais si jamais ce n’était pas eux…). Par contre, ce que je sais, c’est que leur attitude n’a de toute façon pas toujours été très saine, ça, je le sens au plus profond de moi, ça, j’en suis sûre…et ça, ils en sont responsables, en tant que parents… donc même si je ne veux pas prendre le risque de les accuser à tort, je sais que la priorité, c’est MOI, et les miens (mon ami et mes enfants…). Et je ne laisserai plus rien passer avant ça… Alors mon positionnement et le lien avec mes parents s’est forcément profondément modifié ; je ne téléphone plus que de temps en temps, toutes les 2 ou 3 semaines (alors qu’avant, c’était eux qui appelaient, et au moins de façon hebdomadaire… pourquoi ce silence si ce n’est qu’il les arrange, eux aussi ?) ; aller les voir, ce n’est jamais sans un tiers extérieur, pour me préserver de toute discussion qui pourrait arriver et que je ne suis pas prête à affronter, qui potentiellement serait dangereuse pour moi… aller les voir, c’est seulement pour que mes enfants continuent à mettre une image sur leurs grands- parents, et inversement, mais plus jamais ils ne resteront seuls chez eux… mon devoir de mère… tant que je suis présente, je sais qu’ils ne risquent rien… Bref, des liens bien distendus, mais ça me fait plaisir quand même d’avoir ma mère une heure au téléphone de temps en temps ; même si  je relativise chacune de ses paroles, désormais… Bref, désormais, je me protège, je ne me mets pas dans des positions délicates, je ne laisse plus l’autorité parentale me tétaniser (il suffirait d’un seul regard glacial de mon père pour que « j’avoue » que je suis une menteuse, une mythomane) ; je ne me mets pas dans ces conditions tant que je ne suis pas certaine de pouvoir soutenir son regard et lui dire qu’il ne me fait plus peur… Voilà, c’est ainsi que j’ai trouvé mon compromis : ne pas leur faire trop de mal au cas où ça ne serait pas justifié, mais d’abord, en priorité, ne pas me faire de mal à moi- même, ni aux miens… nous avons bien assez souffert, et nous ne le méritions pas… mes enfants, quand j’étais sous médicaments, je n’en ai aucun souvenir, je sais juste qu’ils ont vécu avec une maman complètement shootée, presque morte… plus jamais ça… alors je ne souhaite pas de malheur aux autres, mais je refuse que l’on nous fasse du mal… Bref, pour conclure, je dirais que je n’ai pas encore trouvé le lien que je pense « juste » avec mes parents, mais j’ai trouvé le compromis, qui pour l’instant, me fait le moins souffrir… et je pense que ce positionnement évoluera… dans quel sens ? je n’en ai aucune idée aujourd’hui… Par contre, ce que je sais, et que je voudrais dire à ceux qui reconnaîtront des similitudes dans ce récit avec ce qu’ils vivent actuellement, c’est que même quand on descend très bas comme je l’ai fait, tout près de la mort, et même si ça semble inconcevable tant la douleur est forte, la situation n’est malgré tout que passagère… aussi incroyable que ça puisse paraître, on peut se relever après toutes ces souffrances… je pense être tirée d’affaire aujourd’hui, j’ai remis les pieds dans la vraie vie ! je devrais reprendre le travail dans quelques mois, mais le plus important, c’est que j’ai maintenant assez de vie en moi pour prendre soin de moi, pour vivre avec mon ami, et pour essayer d’aider mes enfants à grandir… la vie est merveilleuse, après la tempête…  Un profond merci à ceux qui m’ont aidée… Et beaucoup de courage à celles et ceux qui sont encore dans le tumulte…  tenez bon…
Johanna



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