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Je vais vous raconter une petite histoire

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Décembre 2012

Je vais vous raconter une petite histoire.
Une nana, 16 ans est amoureuse d'un garçon (19 ans).
Cela fait plus d'1 an qu'ils sont ensemble. A chaque rendez-vous, la fille est pleinement heureuse, se dit que c'est pour la vie, fait des plans sur la comète. Lui est de plus en plus proche. Ils ne font pas que s'embrasser, les caresses sont de plus en plus présent. Jusqu'au jour où le garçon l'invite chez lui, en précisant que les parents seront absents. Elle, et ben elle comprend pas, c'est pas la première fois qu'elle va chez lui, avec ou sans les parents du reste. Et puis elle fini par se dire que le jour J est arrivé, mais oui pourquoi a t-il précisé que les parents seraient pas là. Elle a peur, la boule au ventre, mais elle en a envie, après tout c'est l'homme de sa vie.
On y est, elle passe à la pharmacie (génération SIDA, elle ne
prend pas la pilule). Arrive chez lui, il l'invite au salon, lui sert à boire, l'embrasse, la caresse, comme d'hab'...la nana se dit qu'elle s'est fait des idées...qu'il ne se passera rien...elle n'ose pas en parler...
Mais c'est lui qui en parle, c'est lui qui demande si elle en a envie, oui dit-elle, très envie, mais elle a peur de ne pas être à la hauteur, elle lui dit, il l'a rassure. Lui prend sa main et l'emmène dans sa chambre.
Et là, surprise, et quelle surprise...deux gars dans la chambre, la fille ne les connait pas, et elle n'a pas le temps de réagir les 2 hommes l'ont déjà agrippé. Et là je te passe les détails. Les uns après les autres, chacun y va de bon cœur. Tout s'arrête car ils n'ont plus de capotes, mais l'autre cruche dit qu'elle en a. Et c'est reparti de plus belle. Tout y passe. La nana se laisse faire, ne dit rien, a envi de hurler mais ne se débat même pas, parfois elle y prend goût, elle ressent même du plaisir par instant.
Ils finissent par se lasser et la laissent partir, la menaçant de
représailles si elle parle. Et d'abord qui va la croire. Elle rentre chez elle et se tait.
La fille, c'est moi. Un après midi de Mars 1988.
Je suis coupable. L'émission que j'ai regardé sur France 5, "Viol,
double peine", me conforte dans cette idée et celle de France 2, "Viol, elle se manifeste", pareil. Toutes ces femmes, leurs témoignages...elles ont toutes dit non, certaines se sont débattues...
Bibi n'a rien fait, j'suis restée passive, à aucun moment je n'ai dit non, pas une seule fois. Un me tenait, le deuxième me déshabillait et mon petit ami tenait à être le premier. Et les autres ont suivi, chacun à leur tour, parfois 2 à la fois. Oh misère comme j'ai honte. Je souffrais en silence. Je ne les ai pas repoussé, je ne leur ai pas dit que je ne voulait pas, je ne me suis pas débattue. Rien, j'ai juste laisser faire. Je ne peux pas considérer ça comme un viol. Je n'ai pas ma place dans ces 2 émissions, j'entends d'avance les commentaires, et d'ailleurs je les entends déjà... J'ai peut être les mêmes blessures, mais elles au moins n'ont rien à se reprocher, contrairement à moi.
Comment pourrais-je aller mieux ? Oublier, ne plus y penser...

Bibi

Bonjour, Vous ne pouvez pas "considérer çà comme un viol" et pourtant ce sont bien des viols en réunion que vous avez subis!
Bien sûr, vous vous en voulez tellement, vous vous méprisez tellement,"l'autre cruche" dites vous, que vous "préférez" vous rendre presque "héroïquement" coupable plutôt que d'accepter l'idée que vous vous êtes bien "faite avoir", que vous avez été complètement trompée et manipulée, humiliée par cet individu que vous aimiez, que vous avez été absolument impuissante à les repousser.
Physiologiquement, votre corps réagit aux stimulus, ce qui n'est pas inhabituel et au milieu de votre cauchemar, vous vous dites, que "la cruche" éprouve même du plaisir alors que votre esprit est sans doute dissocié de votre corps.
Vous êtes "ailleurs" et le corps, que vous leur abandonnez, est entre leurs mains ; autrement dit, vous ne po -uviez vous défendre et d'ailleurs, comment l'auriez vous pu puisque "un me tenait, l'autre me déshabillait" et l'autre vous violait ; dites moi ce que vous auriez pu faire sinon "quitter" psychologiquement ce corps prisonnier?
Ce que vous avez fait.
La sidération est un mécanisme de défense qui permet
d'atténuer un peu le traumatisme du viol dans la mesure où, la victime abandonne son corps tandis que son esprit tente de s"évader mais jamais, la victime n'est complice de ce qu'elle subit.
Ils le savaient bien que vous n'étiez pas consentante, que vous ne vouliez surtout pas et qu'ils commettaient des actes graves, puisqu'ils vous ont menacée au cas où vous parleriez! Vous auriez eu, évidemment, toute votre place dans les émissions que vous citez.
C'est mon avis et d'autres le partagent.

Souhaiteriez vous être publiée dans notre espace échange avec
cette adresse ou une autre afin de recevoir d'autres réponses?
Je reste à votre disposition. Dans l'attente, Cordialement,
Chantal POIGNANT

Agent de conseil

Bonjour Chantal,
Merci d'avoir pris le temps de me répondre.
Pourquoi je me sens si mal ? Y a t-il une solution pour aller mieux ?

Suite à ça, j'ai passé 3 ans d'abstinence, et j'ai rencontré un garçon, et c'est à ce moment là que j'ai su que j'avais ressenti du plaisir.
C'était ma première fois et quelle première fois...inoubliable...je ne comprenais pas ce qui m'arrivais, je l'ai su plus tard et suite à ça j'ai voulu me foutre en l'air. Une amie rentrée plus tôt de vacances m'a découvert et veillé sur moi. Elle n'a jamais su pourquoi j'avais fait un tel geste.
Et depuis, je buvais, j'en parle au passé, parce que depuis le 4 décembre 2011, je suis sobre. Boire m'a permis d'avoir des relations avec les garçons. Pas d'alcool, pas de relation. Je me cachais derrière l'alcool, je buvais pour oublier, pour ne pas être moi. Pour me punir sûrement. Aujourd'hui, je ne bois plus, mais je n'ai pas oublier. Je tiens bon, même si c'est dur parfois, mais je ne dors plus beaucoup. Je n'ai plus de relation avec quiconque, plus de vie sociale.
Quand je ferme les yeux, je revis cette
journée, comme si c'était hier. Et ça fait toujours aussi mal. Je refait l'histoire avec des si...et si j'avais refusé l'invitation...et si je m'étais débattu...et si j'en avais parlé à une personne...
Je pleure et souffre en silence. J'entends les personnes autour
de moi, qui ont des réflexions sur des nanas comme moi. J'ai honte à un point vous pouvez pas vous imaginer. Vous dites que je suis une victime et Bibi se sent coupable. Coupable d'avoir rien dit... Coupable d'avoir rien fait... Coupable d'avoir fait confiance...
Aujourd'hui j'ai 40 ans, je me lève tous les matins, bien ou mal,
la journée se passe.
Je vous autorise à publier mon histoire.

Bonjour,
Vous êtes en proie à un conflit psychique interne qui vous
paralyse : vous avez le sentiment de vous être écartée de la norme sociale commune ; vous avez l'impression que l'opinion vous stigmatise d'autant plus que vous avez une représentation de votre propre image complètement détériorée.
Vous vous ressentez, atteinte dans votre être, et comme seule en cause vis à vis du groupe social.
Face à cette angoisse, vous avez développé une problématique
alcoolique.
L'alcool produit une sorte d'effacement des limites et des différences (dans le sens où il permet une certaine "dissolution") et vise à vous défendre (mal évidemment) contre l'angoisse de la mauvaise représentation que vous avez de vous-même.
Cette problématique alcoolique a sans doute pu se développer à partir du traumatisme subi parce vous doutiez déjà, avant le traumatisme, de vous-même.
Il n'est pas trop tard, Bibi, pour vous reconsidérer sous un meilleur regard.
Avez vous bénéficié d'une thérapie de soutien (de votre image)?
Dans l'attente,

Cordialement,
CP

Non, je n'ai suivi aucune thérapie. J'ai gardé le silence durant 24 ans. Je faisait comme si tout allait bien. D'ailleurs quand j'ai décidé d'arrêter de boire, mon entourage n'a pas compris et ne comprend toujours pas.
Je savais me contrôler, je maîtrisais dans la journée. Seule, j'augmentais la dose, jusqu'à m'abrutir complètement. Je n'ai jamais eu de relation sexuelle en étant sobre, toujours bourrée la Bibi.
Mais le 4 décembre 2011 à 2h du matin, lors d'une soirée, j'ai perdu connaissance, j'avais certes bu quelques verres mais rien de comparable à ce que je buvais d'habitude. Je me suis réveillée à l'hôpital et j'ai pris peur. Je me suis que que je fonçais droit au mur et qu'il fallait que je réagisse. Et j'ai décidé de tout arrêter, non sans difficulté. Au début, je continuais à sortir, faire comme si tout allait bien. Mais mon entourage ne comprenait pas cet arrêt soudain, continuait à me servir un verre malgré mon refus, alors je quittais la soirée. Je finissais par ne plus sortir du tout. Ce qui est le cas aujourd'hui.
Je sais bien que je ne suis pas sorti d'affaire. Un verre et
je replonge, je suis tentée encore aujourd'hui de boire. Mais je tiens bon.
J'ai fini par me confié à une personne. Une collègue qui a
été muté. Que je n'ai pas revu depuis mai 2011, mais les mails, SMS, appels, nous ont permis de rester en contact. Et en février 2012, de fil en aiguille, j'ai fini par lui raconter mon histoire, par mail, comme je l'ai fait avec vous. On n'a jamais parlé au téléphone, on ne s'est pas revue depuis. Et j' appréhende ce moment, qu'elle regard va t-elle posé sur moi. Elle me verra forcément différemment.
Je doute de moi, j'ai peur de tout. Je tourne en rond, je n'y arrive plus.
Bibi

Bonjour,
Vous êtes entrée dans un processus d'abstinence que vous avez décidé vous-même.
Je vous trouve très courageuse car ce processus exige
beaucoup d'énergie "interne" ; en effet, quand la personne alcoolique lutte contre l'alcool, elle combat un mauvais "objet" extérieur à elle-même (l'alcool) et dans ce sens c'est positif mais très difficile car dans l'alcool, se trouve comme intégrée (c'est une métaphore) une part de soi-même, c'est à dire, la partie vulnérable, par exemple, celle que vous méprisez et que vous traitez de "cruche" et même si vous souhaitez exclure une certaine partie de votre personnalité, celle-ci tant qu'elle ne sera pas soignée, continuera à souffrir et à agir presque comme un "membre fantôme" selon certains spécialistes.
C'est la raison pour laquelle, je vous demande de bien
vouloir vous faire accompagner et soutenir dans ce processus de "désintoxication", d'autant plus que votre entourage ne vous aide pas parce qu'ils sont (les gens qui vous entourent) ignorants et maladroits plus que "méchants".
N'ayez pas peur de l'aide que l'on pourrait vous apporter ; osez la demander. Je vais publier nos échanges mais n'interrompez pas la communication avant d'avoir entamé un soutien psychologique spécifique.
Souhaitez vous que votre adresse figure sur la publication afin de recevoir d'autres réponses? Je reste à votre disposition.
Cordialement,
CP

Bonsoir,
Je vous le confirme, c'était super dur, encore aujourd'hui. Mais je vous l'ai dit, je tiens bon. Je ne me drogue pas , en faite si...je fume. Clopes et cafés. Pas de calmants, ni somnifères. J'suis pas tentée, à la maison, y en a pas.
Au début je tremblai, mais maintenant ça va, sauf que je suis maintenant face à moi-même et ce que je ressens ne me plait pas. Quand je suis vraiment pas bien, je vais courir. Et je cours souvent.
La personne à qui j'ai osé en parler m'a dit comme vous,
que je suis une victime. Pourquoi je n'arrive pas à me persuader que je suis victime. Pourquoi je me sens fautive, pourquoi je ne me trouve aucune excuse. J'aimerai juste tourner la page, ne plus y penser. Y a t'il une solution pour apaiser mon esprit.
24 ans de silence, de honte, faire comme si tout allait bien. J'suis fatiguée...ce qu'ils m'ont fait, misère, leurs mains, leurs... et je n'ai rien fait, je ne peux pas mettre des mots sur ses maux. Pourquoi j'ai continué à faire c'est qu'ils m'ont fait ?
Je vis jour après jour, sans penser au lendemain. L'avenir, je
n'y pense pas.

Vous pouvez utilisez l'adresse bibimousse@gmail.com

Je tiens à vous remercier de prendre le temps de me répondre. Bibi est si compliquée. Tout s'embrouille dans ma tête. Seule je n'y arriverai pas, j'ai mis 24 ans à m'en rendre compte. C'est peut être trop tard.
Bibi




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