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J'ai été séquestrée et brutalisée par un membre de ma famille

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Juin 2011


Madame Poignant,
Je vous soumets ci-dessous le lien d’un article – « Lettre à l’éditeur » – publié cette semaine en version web et papier dans trois publications des éditions de presse Robinson à Seattle, USA, où je réside.
http://www.ballardnewstribune.com/2011/06/03/opinion/letter-editor-dsk-only-reason-he-got-caught-be
PS : Vous noterez que votre organisation est référencée dans l’article.

J’ai été séquestrée et brutalisée par un membre de ma famille lors d’un récent séjour en France et, en plus du choc résultant de l’attaque elle-même, je reste perplexe devant la rapidité avec laquelle ma plainte a été « classée sans suite ». Je suis reconnaissante à cet éditeur de m’avoir prise au sérieux, de n’avoir pas mis ma parole en doute ; et de me permettre de donner voix à mon indignation devant un déroulement qui, vu des Etats-Unis, paraît tout simplement inimaginable. L’agresseur n’a été inquiété en rien, malgré des violences perpétrées dans la passé contre sa mère (+ probablement feu son épouse) et des sévices barbares à l’encontre de ses propres enfants (pourtant placés en famille d’accueil par la DASS).
Si vous souhaitez publier mon témoignage indigné - ne serait-ce que partiellement - je me propose de vous le traduire en français. Notez que ce petit succès médiatique outre-mer ne représente pour moi que la première étape. Je suis déterminée à être entendue par les autorités françaises : à obtenir qu’une enquête en bonne et due forme soit menée afin que l’agresseur ait à répondre de ses actes devant la justice. Cela en mon propre nom, bien entendu, mais aussi en celui des milliers de femmes qui, en France, se taisent ou abandonnent toute poursuite, sachant par avance que tout monde – la police, les magistrats et le public – s’en fout.
Bien à vous,
C.3 Juin 2011
Lettre à l’Editeur de « Robinson News », Seattle, Etat de Washington, U.S.A.
Par Carmen Parrinello

La raison pour laquelle il s’est fait pincer c’est qu’il l’a fait aux U.S.A.
Je suis née en France et réside depuis plusieurs années aux Etats-Unis.
Il y a quelques semaines, lors d’un séjour à Paris, j’ai été séquestrée puis tabassée par un homme de ma famille. Les violences étaient non-provoquées de ma part et volontaires de la sienne.
Suite à une conversation qui n’augurait rien de bon, je décide de quitter l’appartement du membre de ma famille que j’étais venue visiter. L’homme dont il est question refuse alors de me laisser sortir. Je demande très calmement, à plusieurs reprises, qu’il déverrouille la porte. Il refuse net, sans autre raison que celle – selon moi - de m’imposer son pouvoir de mâle. Je sens que la situation est sérieusement en train de dégénérer : j’ai tout de même 54 ans et devrais pouvoir aller où bon me semble ! Rien à faire ; l’absurdité de son geste ne semble même pas effleurer son esprit. Profitant d’un moment d’inattention de sa part, je m’empare rapidement du téléphone et m’enferme dans les toilettes. Panique : j’ai complètement oublié le numéro des urgences en France et c’est seulement après plusieurs essais infructueux que de très loin dans ma mémoire me revient le nombre « 17 ». Quel soulagement d’entendre enfin la voix d’un policier ! Je le supplie de venir me sortir de là. J’explique la situation ; il me demande quel âge j’ai et quand je lui réponds, il semble interloqué. « Mais bien sûr que vous pouvez aller où vous voulez ! » confirme-t-il. J’avoue qu’à ce stade, j’avais quasiment commencé à en douter.
Quelques instants plus tard, des officiers sont derrière la porte et essaient de se faire ouvrir. Persuadée que l’agresseur répondrait aux sommations de la police, je sors de ma cachette et là, tout au contraire, l’homme m’attrape et se met à me frapper… Je me mets à crier ; le visage de l’homme est implacable ; ses coups sont déterminés, systématiques… On dirait que dans toute sa vie il n’a fait que cela. Je suis terrifiée. Et puis il y a ce moment très bref, une fraction de seconde, où j’ai la vision que je vais peut-être mourir alors que la police ne se trouve qu’à quelques mètres de moi...
Finalement trois officiers sont là ; je ne pas sais trop comment ils sont entrés. Ils me demandent si je veux faire une déposition et si je veux qu’on emmène mon agresseur au commissariat. Je réponds oui aux deux questions. C’est à ce moment-là que mon histoire et celle d’une certaine femme de chambre d’un hôtel newyorkais se recoupent…
L’homme qui m’avait brutalisée a été relâché aussitôt ; aucune enquête n’a été faite, aucun des nombreux témoins de l’immeuble qui m’ont entendue hurler n’ont été interviewés, pas même les trois policiers venus me secourir. Environ un mois plus tard, j’apprends que ma plainte a été « classée sans suite ». Je demande le nom du juge qui a pris cette décision sans que j’en soie avertie ; le policier qui me répond au téléphone rétorque assez brutalement qu’il y a « au moins 20 magistrats à la Cour, alors comment le saurait-il ? » J’insiste, je veux porter plainte. Il précise que mon dossier est maintenant clos et que pour le rouvrir je dois déposer une caution dont le montant sera déterminé par la Cour. Comment cela une caution ? C’est moi la victime et je devrais déposer une caution ? « Mais oui, ma petite dame… » commence-t-il… Là, je l’interromps : je lui fais remarquer que « ma petite dame » est une expression condescendante et moqueuse, je lui demande de me parler avec respect… Il me raccroche au nez…
Maintenant, pour ceux et celles qui se demandent comment un individu comme DSK aurait pu faire ce qu’il est accusé d’avoir fait à cette femme de chambre du Sofitel de New York et croire qu’il s’en tirerait sans aucune conséquence (s'il l'a fait), il suffit de savoir qu’il aurait déjà fait ce genre de chose à plusieurs autres femmes dans le passé sans jamais en être inquiété le moins du monde. Car lorsque cela vous arrive en France, il faudrait être folle pour croire que quoi que ce soit sera fait pour vous : vous vous taisez et vous protégez ainsi de conséquences encore plus désagréables.
Grace au système féodal toujours en vigueur dans notre pays, des milliers d’abuseurs continuent de maltraiter femmes et enfants dans l’impunité la plus totale : ni la police ni le système légal ne s’en préoccupent le moins du monde. Même mes amies acceptent le statut-quo sans broncher ; certaines me disent de « laisser tomber » ; la plupart préfèrent ne formuler aucune opinion.
En France, une femme meurt tous les 2 jours et demi dans les mains de son partenaire masculin ! Mais en France, la prévention de la violence faite aux femmes et l’interpellation des agresseurs n’est pas une priorité pour les politiques ; quoi qu’on en dise. Pendant les quelques minutes qu’il vous faudra pour lire mon témoignage, X femmes auront été brutalisées…
* http://www.sosfemmes.com/violences/violences_chiffres.htm
Et pourtant nous savons toutes que les bureaucrates léthargiques qui peuplent nos administrations ne feront jamais rien pour nous ; pas plus que leurs arrière petits-fils dans les années à venir.
Après avoir contacté une douzaine d’organismes gouvernementaux et non-gouvernementaux, il est devenu clair pour moi que quoi que je dise et quoi que je fasse, je recevrais les mêmes réponses stéréotypées, robotiques… Aucune véritable écoute et surtout cette sorte d’accord tacite visant à vous décourager d’engager toute poursuite.
Voilà le pays que j’ai quitté il y a plus de 25 ans et où absolument rien n’a été fait en termes de prévention des violences faites aux femmes ou d’appréhension des agresseurs.
Les femmes y sont toujours des « objets », des possessions, du bétail ; on attend toujours d’elles qu’elles supportent en silence les transgressions psychologiques ou émotives et les violences physiques, y compris celles conduisant trop souvent encore à la mort ; perpétrée par le conjoint ou qu’elles s’infligent à elles-mêmes en désespoir de cause.
Dans l’attende de son jugement, Dominique Strauss-Kahn vit désormais dans un palace newyorkais qu’on voudrait faire passer pour une « prison », parce que quand vous êtes un « monarque » français rien n’est jamais assez bon pour vous, quoi que vous fassiez et où que vous soyez.
Comment avez-vous osé, peuple d’Amérique l’exposer ainsi menotté aux flashes des paparazzis !
Et comment avez-vous pu donner tant de crédit au récit d’une simple bonniche - qui plus est de couleur - qui n’a pu qu’inventer cette histoire à moins qu’elle ne soit tout simplement un agent de la CIA ?
Comment avez-vous pu fixer un bracelet à la cheville de ce « Sieur », comme s’il n’était qu’un vulgaire plébéien, comme vous, comme moi ou comme cette domestique suspecte ?
Amis Américains, sachez que lorsque vous viendrez visiter notre beau pays cet été, vous n’aurez pas simplement fait quelques milliers de kilomètres à travers la planète ; vous aurez également effectué un bond en arrière de plusieurs centaines d’années.
Les violences domestiques/familiales ne sont JAMAIS des affaires privées.
* maeva808@yahoo.fr


J'aimerais aussi vous soumettre cet article :
VIOLENCES SEXUELLES : QUELS SONT LES CHIFFRES ?
 
75 000 viols seraient commis en France chaque année, un chiffre conséquent qui selon les chercheurs et les associations reste  pourtant très éloigné de la réalité. Difficile d’établir de vraies statistiques lorsqu’on sait que seulement 10% des tentatives de viols et viols sont signalés à la police et à la gendarmerie.
En 2011, selon l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, 412 viols sur majeurs ont été commis en janvier, 345 en février et 439 en mars. Les agressions et harcèlements sur majeurs s’élèvent à 401 en janvier, 387 en février et 436 en mars. On parle ici uniquement de faits constatés, qu’en est-il des viols ou agressions sexuelles non dénoncées ?
Pour rappel, en 2007, 4 677 viols ont été constatés sur des majeurs, 4634 en 2008, 4581 en 2009 et 4720 en 2010. Les femmes hésitent encore à dénoncer les violences sexuelles dont elles sont victimes et, face à la justice, peu de plaintes aboutissent. Si on se plonge dans les statistiques du ministère de la Justice, 1684 personnes ont été condamnées pour viols en 2008. 1670 agresseurs sont passés devant la justice pour agression sexuelle en 2008, dont 53 pour harcèlement sexuel. En 2009, 7902 agresseurs ont été condamnés pour l’ensemble des viols (sur majeurs et mineurs) et autres agressions sexuelles.
Briser le silence
Certains viols et agressions sexuelles sont déqualifiés en harcèlement sexuel dès lors qu'ils ont été commis dans des relations de travail, tandis que la majorité des victimes, sous l’effet de la peur, de la honte, de la volonté d’oublier, de la peur de se faire virer, ou stigmatiser par la famille ou les amis, se taisent. Briser le silence et encourager les femmes à porter plainte reste le challenge de nombreuses associations depuis des années déjà.
Et même si l’on entend affirmer de plus en plus depuis l’affaire DSK que « la parole des femmes s’est libérée », rien n’est encore fait. Comme le rappelle Marilyn Baldeck, de l’Association contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT) : « Ces dernières semaines, on a pu constater un changement de rhétorique en matières de violences sexuelles, la parole des victimes est davantage prise en considération... dans les médias. Mais pour l'instant ceci n'a aucun impact positif sur le traitement des plaintes des femmes victimes par les différents acteurs de la chaîne pénale (mais aussi par les médecins, syndicats...), qui est toujours aussi insuffisant. Nous continuons d'affronter les ‘elle l’a bien cherché’, ‘elle était consentante’, "elle fait ça pour l'argent" ou "attention aux dérives à l'américaine" y compris chez les professionnels. Il est important qu'on en parle enfin, mais il existe un risque que dans l'esprit des gens, la réalité médiatique dans laquelle "ça va mieux" se substitue à la réalité de terrain dans laquelle peu d'améliorations sont constatables. Et s'il se confirme que "la parole des femmes se libère", pour reprendre une expression qui a fait florès ces derniers temps, il va bien falloir que les institutions réagissent en conséquence. »
Emilie Poyard Le 16/06/2011 pour le magazine « ELLE ».


Là où je veux en venir c'est que je considère que les choses doivent évoluer au niveau des lois, donc du gouvernement. Il faut que nous fassions pression sur le gouvernement, en nombre et par tous les moyens légaux possibles. L'article du magazine Elle est comme tous les autres... des chiffres... ceux des agressions...
Mais ce ne sont pas ces calculs abstraits qu'il faut continuer de ressasser ; il faut frapper les imaginations en publiant les nombres des femmes (et de certains hommes) qui, à la suite d'inceste ou de viol verront le reste de leur vie s'écrouler, sombreront dans la prostitution ou les drogues dures, se donneront la mort, ou finiront victimes de violences domestiques ou autres abus.
Il faut décrire pour le public ignorant - ou en état de déni - les effets exacts d'un viol sur la psychée humaine, à force de témoignages de spécialistes concerné(e)s et de femmes intelligentes qui s'en sortent ou s'en sont sorties (le plus souvent toutes seules), qui ont réussi au fil des ans à regagner leur dignité et leur intégrité démollies ; une minorité, j'en ai peur. Il faut décrire aux gens (comme je le fais pour ma part) les faits nus et réels et ajouter : "Comment tu te sentirais si quelqu'un faisait subir exactement ça à ta fille, ta soeur, ta mère ?"
Il faut aussi désexualiser le viol : un viol n'a rien de sexuel ; il s'agit d'un pur et simple acte criminel, d'une forme d'assassinat ayant pour particularité de laisser la victime vivante... en apparence.
Il  n'y a rien de "sexy" dans le viol ; pas plus que dans un cambriolage ou une attaque à main armée. Il s'agit essentiellement d'une forme particulièrement destructive de violence physique et psychique, dans laquelle le pénis fait office d'arme. Point ligne.
La question qui nous occupe - celle des violences que j'ai subies récemment - et les autres formes de violences faites aux femmes ou aux enfants procèdent toutes de la même dynamique ; il est devenu nécessaire de sortir des lieux communs et d'appeler les choses par leur nom. Il est devenu indispensable de sortir du mutisme et de l'acceptation de l'inacceptable. Jai vécu 10 ans au Canada et 10 autres aux USA. Ces deux pays sont très en avance sur le nôtre ; il serait judicieux de s'inspirer de leurs succès (quoiqu'encore insuffisant) ; voire de travailler en collaboration avec eux. Il nous faut viser haut et nous tout faire pour être entendues des politiques et les législateurs.
Je fais ma part et j'aurais peut-être besoin de votre aide à l'avenir pour concrétiser mon action.
En attendant encore merci,
Carmen

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